Mieux Vivre à Malartic Association loi 1901

Textes et poèmes de nos adhérents

UN TEXTE DE JEAN LANDRY (AVRIL 2014) - TEMOIN QUI NOUS FAIT FREMIR
"C'est hier (clic)"

     Une larme.  (Mars 2013)
Si j'étais une larme,
Je caresserais ta joue,
Effaçant le vacarme
Des cris et des courroux.
Je prendrais les chemins
Les plus longs pour partir,
Evitant que ta main
Sèche mon avenir.
Je glisserais longtemps,
Je vaincrais les passages
Qu'infligerait le temps
A ton tendre visage
   Lea Lutinacci









Et je résisterais,
Me mettrais à l'abri,
Pour pouvoir consoler
Ton âme dans ses replis.
Je bercerais ton coeur
Evitant les faux pas,
Dans l'océan des pleurs,
Pour tomber dans tes bras.
Là, je m'effacerais
Aussi discrètement,
Que j'étais arrivée,
Dans un souffle de vent.


La statue  (Mars 2013)

Stèle grise silencieuse pour l'éternité
Plongée dans une atmosphère d'infinité
Spectatrice passive, naturelle de pureté.

Elle ancre la pierre dans ses chairs
Comme une transparente lumière,
Fantôme diurne devenu émissaire.

Magnifiée dans les faisceaux du soleil
Son regard se cristallise dans le ciel
L'ambigüité de sa pâleur s'éveille.

Pas un murmure sous la pluie traversière,
Pas une prière, douce écorce de pierre.
L'illusion d'une présence devient poussière.

Pas l'ombre éphémère d'un discours.
Pourtant, des âmes rebelles aux alentours
Se prosternent à vos pieds chaque jour.

Fresque muette blanchie par la lune,
Tes courbes séduisent des créatures nocturnes,
Ces spectres incertains au caractère taciturne.

Le fantasme d'une existence présente
Conserve le souvenir des voix absentes.
Ton symbole est figé dans cette constante.

Statue d'un autre monde tu tiens ta pose,
Rongée par quelques esprits moroses
Tu encenses l'incantation de ces proses.
  Michel leborgne

       LE TIGRE    (décembre 2012)
Pourquoi quand on est jeune tigre de Bagdad
A belle robe unie, esthète et nomade
Vouloir absolument lever cette hypothèque
De l’existence même d’une bibliothèque
Babylone, pour lui, est le but de la vie
Il ne peut accepter que, par un incendie
Disparurent à jamais d’inestimables chefs-d’oeuvre
Il ne peut pas y croire, ou il en veut la preuve
Et, par Dieu, n’y a t il meilleure solution
Que de le constater par sa propre vision ?
Sans autre réflexion, un matin de printemps,
Se décide –t-il donc à s’y rendre en nageant
Remonter le Tigre puis l’Euphrate
Est pourtant réputée pour tâche délicate
Qu’importe ! Investi par sa propre mission
Notre tigre se lance dans son expédition
Sûr qu’aux rivages de sa mythique cité

Dans toute sa splendeur, naîtra la vérité !
Il se met donc à l’eau ! Nage de longues semaines !
Affronte mil obstacles ! ignore sa mort prochaine
Son corps n’est plus que sang ! mais vivant tous ses rêves !
Pour atteindre son Graal, il n’admet point de trêve !
Et soudain, tous ses efforts sont récompensés !
Au sortir d’une courbe, c’est la félicité !
Devant lui, enfin dans sa magnificence,
La bibliothèque, enjeu de son existence,

    Se dresse, telle qu’il l’avait imaginée !
    Pas une seconde à perdre ! Il veut en profiter
    Sur le rivage, il court se soûler de sa quête !
    S’enivrer de ces livres sera son ultime fête !
    Car le destin est là ! Partout, il est cruel !
    Voir un tigre en ville n’est pas chose habituelle !
    Aussi chacun prend peur ! et chacun s’interroge !
    « Qu’est cette horrible bête ? Il faut qu’on la déloge !

De notre sûreté, elle est une hypothèque !
Alors tout fait arme ! Bâton, melon, pastèque !
Saisissant tout ce qui se trouve à leur portée
Les Babyloniens ne songent qu’à l’étriper
Alors, notre tigre oublie ses rêver de gloire
Et le goût amer de sa lugubre victoire
Devant cette ruée, le courageux félin
Du Désert salvateur, emprunte le chemin
Vif comme l’éclair, il ne doit qu’à sa vitesse
D’échapper à cette engeance scélératesse
Le voilà sauf ! de son utopie, orphelin !
Pour lui, Babylone n’est plus qu’un patelin
Où l’espoir se perd ainsi que la santé !
N’a-t-il pas les flancs cruellement enflés ?
Depuis ce triste jour, le tigre est illettré,
Mais porte avec fierté, une robe tigrée !
      "Pascal Monfroy"

IMPRESSION AUTOMNALE  (septembre 2012)

Laisser la douceur des choses
Pénétrer mon être
Et peut-être
S'infiltrer dans mon âme.
Laisser agir le charme...

Toutes ces couleurs,
Beige, cuivre, ocre, or, rose,
Fondues en une brume rousse,
Imprégner mon coeur
En marquant
Ce moment
D'une flamme si claire, si douce,
Témoin vivant d'un bonheur
Immatériel, face aux menaces
De l'âpre désert
D'un prochain hiver.

Et le refus de la peur...
Vent qui souffle doucement.
Afflux de sentiments.
   Evelyne Labannère

Haut de page

   Page d'accueil
             PRINCE EST PARTI.  (septembre 2012)
Un chien noir se promène dans le soir.
C'est la pleine lune. Je le vois.
Il court dans les plaines et les bois.
Il fuit sur les dunes. Son dos ondule.
Son poil ras luit dans la nuit.
Il entend plus de bruits que tu n'en perçois.
Et même, des fois il écoute sans que tu t'en doutes.
Il sent tout ce que tu ne sens pas. Il sent, il ressent.
Il voit mieux que toi puisqu'il voit des choses que tu ne verras pas.
Surtout la nuit. Dans ton lit tu dors, et puis tu rêves.
Lui dehors, il se promène; mais votre quête est la même.
Chien noir, doux et tendre, de ton enfance, plein d'assurances.
Chien écervelé de tous tes désirs de libertés, la truffe collée au sol,
toujours il cherche dans l'odeur fraîche de la terre le parfum de la bonne étoile.
Or cette étoile, c'est ton coeur.
Le sait-il seulement ?
Le chien de Nicolas s'est encore échappé !
  Evelyne Labannère

Un temps pour tout.
Il y a un temps pout tout...
Il y a un moment pour chaque chose  (Ecclésiaste)  (septembre 2012)

Mettre le facteur temps dans sa vie journalière
Agir tranquillement et savoir respirer
Ne pas attendre enfin d'être quinquagénaire
Pour sourire à la vie et repos savourer.

Ah...Pouvoir distiller son bonheur en patience
Cueillir au jour le jour les fruits comme des fleurs
Sans vouloir bousculer le rythme des semences
Prétendant devancer l'heure du moissonneur

Apprendre à écouter, admirer comme un gosse
Oser s'émerveiller devant le fier sapin
Mettre le temps qu'il faut pour "gâter" une sauce
S'assoir pour respirer une touffe de thym.

Promener le matin, pieds nus dans la rosée
En écoutant le soleil qui, il lui, n'est pas pressé
Mais apporte toujours la chaleur et la vie

Dans ma vie, que de fois, je n'ai pas su attendre
Bousculant les minutes à chaque carrefour
Y a le travail à faire et les causes à défendre
Et puis, l'heure qui tourne sans espoir de retour.

On pare au plus préssé, on fonce à toute allure
Y a tant de choses à dire, y a tant de gens à voir
Plus rapide que l'avion, plus vite que la voiture
Pas le temps, je suis pressé. cela ira au revoir.

Parfois même les gens, drogués par la vitesse
Racontent leurs vacances en passant des diapos :
On a "fait" l'Italie, la Turquie, et la Grèce.
Le tout à cent à l'heure et le vent dans le dos.

L'an prochain le Brésil, le Chili, l'Argentine
Sans compter l'equateur et en prime Cuba
Le tout en moins d'un mois : cela t'épate cousine
Toi qui est restée camper dans un cio du Jura.

Ecoute l'Ecclésiaste, en son temps il est sage :
Il propose à tous ceux qui courent à tous vents
De s'assoir un moment au milieu du tapage
Et nous dirait, je crois, mais très paisiblement :
Si tu sais dire non, sans chercher des excuses
A tout dépoiement de vitesse et de bruit
Si tu sais admirer un enfant qui s'amuse
Tu resteras un homme et non un sous produit ...
   Poème écrit par Emile

Pluie de rêves          (Le 11 avril 2012)
Quand depuis ma fenêtre je vois tomber la pluie
Et que le ciel chargé estompe le soleil,
Le bitume luisant, où se reflète la vie,
La transforme en tableaux, irréels, sans pareil.

Alors mon esprit vagabonde et voyage
Vers des lieux inconnus ouverts aux seuls poètes
Montagnes rosées, vallées parfumées, verts bocages
Et plages dorées sans fin où se posent les mouettes.

Pluie, source inépuisable de mélancolie,
Toi dont la vie dépend, trop souvent éphémère,
Reste encore un peu avant que l' embellie
Ne vienne effacer mes rêves et chimères.

Et puis le vent chassera nuages et pensées
Le soleil effacera ces dessins merveilleux
Le bitume retrouvera sa teinte sans beauté
Et moi je voyagerai en fermant les yeux.
                                              (Francis TRELET)

        Un sourire
Un sourire ne coûte rien et produit beaucoup,
Il enrichit celui qui le reçoit sans appauvrir celui qui le donne,
Il ne dure qu'un instant, mais son souvenir est parfois éternel,
Personne n'est assez riche pour s'en passer,
Personne n'est assez pauvre pour ne pas le mériter,
Il crée le bonheur au foyer, soutient les affaires,
Il est le signe sensible de l'amitié,
Un sourire donne du repos à l'être fatigué,
Donne du courage au plus découragé
Il ne peut ni s'acheter, ni se prêter, ni se voler,
Car c'est une chose qui n.a de valeur qu'à partir du moment où il se donne.
Et si toutefois, vous rencontrez quelqu'un qui ne sait plus sourire,
Soyez généreux donnez-lui le vôtre,
Car nul n'a autant besoin d'un sourire,
Que celui qui ne peut en donner aux autres.
   Raoul Follereau.

Haut de page

   Page d'accueil
Il était une fois. . .
Un pauvre bûcheron qui vivait et travaillait dans une forêt profonde.
Il a été envoyé là par son seigneur afin de trouver et d'abattre les plus beaux arbres afin d'agrandir son château.
Il s'est construit une cabane, dans une clairière, utilisant quelques rondins, de la terre mouillée qui, mélangée à de l'herbe sèche, sert a colmater entre les branches, afin de s'abriter du froid et de la neige durant les nuits.
Avec des fougères séchées, il s'est confectionné une paillasse peu confortable. Devant son abri un petit foyer.
Pour se nourrir, quelques champignons trouvés au hasard de ses va et vient, des racines de plantes sauvages qu'il connaît bien, et quand la chance lui sourit il attrape quelques grenouilles ou des écrevisses dans le petit cours d'eau qui coule pas loin et lui donne de l'eau pour boire et parfois même s'en passer un peu sur le visage.
Ces ingrédients lui permettent de se faire une soupe qu'il avale le soir, près de son feu, avant d'aller se coucher, harassé par sa journée de travail.
Le dimanche un de ses fils lui apporte une miche de pain bistre que sa bonne femme a fait cuire au four banal du village, en bas dans la vallée, et, si possible, un fromage grâce au lait de leurs deux chèvres.
Dans la journée, il quitte son campement à la recherche des plus beaux arbres, comme le lui a ordonné son maître. Ils doivent être gros,et hauts de façon à pouvoir en tirer de solides poutres et de longues planches.
Quand il a trouvé ce qu'il cherche, il marque l'arbre par un signe que lui seul utilise.
Bien que la forêt soit grande il la connait bien et y a ses repères. Quand il aura trouvé et marqué ce dont il a besoin, il commencera l'abattage puis l'ébranchage. Enfin des chevaux viendront les tirer pour les livrer aux charpentiers.
Un jour il arrive devant un chêne magnifique. Son tronc est énorme, six hommes se tenant par les mains en feraient à peine le tour, ses branches, dépourvues de feuilles en cette saison, donnent l'impression d'égratigner les nuages poussés par le vent. Ses racines impressionnantes s'enfoncent dans le sol comme de gigantesques serpents .
Il le contemple admiratif, et respectueux, car, se dit-il: " il est sûrement le roi de ces lieux. Jamais je ne pourrais le couper. " Une petite voix lui dit dans la tête : " tu imagines les belles poutres et planches que tu pourras faire dans cet arbre, le seigneur te récompensera sûrement de le lui rapporter, il fera une poutre maîtresse parfaite.
Il hésite, se raisonne, mais la cupidité et la gloire qu'il peut en tirer restent les plus forts. A l'aide de sa cognée il marque l'écorce de son signe. Voilà se dit-il, personne ne me le prendra.
La lumière du jour baisse vite en cette période de l'année, il est temps de regagner son havre. C'est en chantonnant qu'il fait le chemin tant il est heureux que la chance lui ait mis ce géant de la forêt sur sa route.
Après son souper il s'endort rapidement. Des rêves meublent son sommeil agité. Sa conscience restée en éveil le tarabuste lui conseillant de ne pas toucher à cet arbre plusieurs fois centenaires.
Au cours de la nuit il est réveillé par des bruits étranges. Un vent très fort soufflant à travers les branchages les fait craquer, des cris d'angoisse, des pleurs, des gémissements, semblent venir du fond de la nature qui l'entoure.
Son âme simple s'inquiète, la peur le gagne à mesure que les rugissements s'amplifient. Sa cabane craque et gémit. Il entend son chaudron rouler sur le sol. Les superstitions ancestrales remontent à la surface.
La frayeur le tétanise. Il est recroquevillé sur sa paillasse, enroulé dans sa vieille couverture. Il est un animal traqué. Jamais nuit lui aura paru aussi longue et effrayante.
Au lever du jour, la tempête s'est calmée mais les traces sont visibles. Branches brisées jonchant le sol, son chaudron est introuvable, son habitation a souffert.
Hache sur le dos il se dirige vers les arbres à couper. Subitement il est surpris par un bruissement inhabituel autour de lui, dans les broussailles et les taillis.
Il a l'impression d'être suivi furtivement. Quand il s'arrête; rien, pas un bruit si ce n'est celui du vent, quelques croassements de corbeaux ou le jacassement d'une pie moqueuse. Dès qu'il reprend sa marche ce bruit léger, indéfinissable reprend comme le ferait une couleuvre rampant dans de l'herbe sèche.
Il active son pas puis se met à courir, le léger froissement des feuilles mortes semble réglé sur sa foulée. Jetant un regard circonspect il ne détecte toujours rien. Pour la première fois depuis bien longtemps, il prend peur car il ne comprend pas, après cette mauvaise nuit son esprit est un peu embrouillé, Il prend un bâton qui traine là et se met à battre les herbes et les buissons autour de lui.
Soudain quelque chose pouvant ressembler à des rires lui arrive aux oreilles, mais c'est si léger, à peine audible, qu'il se demande si ce n'est pas dans sa tête que tout cela se passe. A force de vivre seul, pense-t-il, je deviens maboul.
Décidé de ne plus y prêter attention, il reprend son chemin qui le guide vers le chêne marqué la veille. Il commencera par celui là , par le plus beau.
Arrivé à son pied, il en fait le tour pour savoir par où il va l'attaquer. Il se recule un peu afin de le voir en entier, le soupeser en quelque sorte. Il lui faudra plusieurs jour, c'est sûr, Il se rend compte de la tâche énorme que cela représente, ne devrait-il pas demander de l'aide? Mais l'orgueil est le plus fort. Il donne son premier coup quand un phénomène étrange se produit.
Sortant dont ne sait où, d'étranges petits personnages, grands comme trois pommes, habillés de vert, un petit bonnet pointu sur le crâne, viennent s'interposer entre l'homme et l'arbre en levant leurs petits bras, et unissant leurs voix se mettent à hurler " arrête ! "
Complètement interloqué, la hache immobilisée au dessus de sa tête, il regarde ces lutins, sans comprendre. Puis , reposant lentement son outil, le bûcheron sent monter en lui une peur irraisonnée, un tremblement incontrôlable s'empare de lui. Tout tourne dans sa pauvre tête. Il croit rêver. Il tombe à genoux et s'adressant aux petits hommes.
" Mais qui êtes vous pour m'empêcher de faire mon travail "
Un lutin s'approche et de sa petite voix qu'il essaye de rendre forte et autoritaire, déclare.
" Bûcheron, nous protégeons ces lieux et par dessus tout, le roi de cette forêt. Ne t'avise plus de lui porter des coups de ta hache sinon ,tu auras affaire à nous "
L'homme répond:
" Ce sont les terres de mon Seigneur, il est le seul à me donner desordres "
" Ce chêne est un symbole, il est la représentation de la vie. Retourne chez toi et ne vient plus détériorer ce qui est le bien de tous! "
Ils disparaissent comme ils sont venus laissant le bûcheron hébété. Il rentre à son campement pour mieux réfléchir à cette situation improbable. En ce temps où les légendes courent les veillées, les superstitions sont fortes, chacun sait qu'il y a du vrai dans tout cela.
" Je ne peux revenir auprès de mon maître les mains vides en lui disant que des petits génies m'ont empêché de faire mon travail "
sa colère serait terrible et les conséquences également. D'autre part, s'il désobéit aux lutins, Dieu sait ce qui va lui arriver, il imagine le pire.
A force de chercher, un souvenir lui revient à la mémoire. Un vieil homme que l'on dit sage vit en ermite à l'orée de la forêt. Il sera sansdoute de bon conseil. Il va le retrouver et lui raconte son aventure.
Le vieux l 'écoute sans manifester d'étonnement. Quand le bûcheron cesse de parler il baisse la tête pour se concentrer quelques instants. Enfin de sa voix chevrotante il explique:
" Longtemps les humains ont pensé que la nature avait une vie propre et qu'il fallait la respecter. Puis, petit à petit, ils se sont dit maîtres de l'univers, étant les seuls à posséder une âme. Partant de là ils n'ont plus rien respecté.
Jetant leurs déchets dans les rivières, défrichant les sols sans limite, cherchant les minerais sans vergogne pour en tirer un maximum de profits, dévastant les forêts pour construire ou brûler. Alors mère nature, lasse de se faire spolier, se révolte et c'est bien.
Réfléchi bien à cela et ne prélève que ce dont tu as besoin sans penser à t'enrichir. Va maintenant.
Comprenant la leçon que lui avait donné le vieux sage, il ne coupa que les arbres dont il avait besoin et les petits lutins de la forêt le laissèrent travailler.
Homme, ne t'imagine pas que la nature a été mise à ta disposition pour t 'enrichir. Elle est ton environnement dans lequel tu as le droit de vivre en la respectant.
Francis Trelet

Haut de page

   Page d'accueil
Rumeur    (24 février 2011)

Tout a commencé par une froide journée d'hiver dans un petit village de province gasconne.
Une rumeur naît, s'enfle, envahit la petite commune à une vitesse étonnante que seuls permettent les téléphones et ordinateurs utilisant internet. Cette nouvelle semble tellement improbable, tellement énorme, que personne ne veut y croire mais tout le monde la répand.
Les conséquences, s'il s'avère que le bruit est fondé, paraissent incommensurables, " qu'allons nous devenir ", un vent de panique souffle dans le secteur. Comment savoir, il devient impossible de joindre les responsables et les édiles tant les lignes téléphoniques sont saturées, et pourtant pas question d' attendre sans rien faire, il y a des décisions à prendre immédiatement.
Ces décisions seront-elles les bonnes, comment savoir puisqu'on ne sait rien!
Pour bien comprendre, revenons quatre ans en arrière. Le petit village de Gondrin avait un budget déficitaire depuis quelques an. Le maire et le conseil municipal essayaient par tous les moyens en leur possession de l'équilibrer mais répugnaient à augmenter les impôts locaux.
Un jeune conseiller municipal eut une idée pour attirer les touristes dans leur commune. Créer un divertissement tous les ans auquel les habitants participeraient. L'idée n'était pas nouvelle mais la sienne était originale: mettre en scène une vieille légende du pays.
Il fallait en outre faire en sorte que les spectateurs, venus du reste de la France, et, pourquoi pas, de l'étranger trouvent à se loger et puissent se nourrir. Ainsi les taxes locales devraient aider à renflouer la caisse communale.
Une fois mise au point, cette idée fut partagée avec les habitants qui s'enthousiasmèrent. Tout le monde, dans la mesure des disponibilités se mit à la tâche.
Les maisons campagnardes, souvent grandes, furent aménagées pour recevoir des familles, l'auberge, près de la rivière, rafraîchie par de jolies couleurs, le camping, en face remis en état ,des tarifs raisonnables de repas locaux, étudiés, l'attraction, qui devait attirer des foules, préparée dans le plus grand secret, il ne fallait surtout pas que les villages voisins soient informés afin que soit préservé l'effet de surprise.
Les répétitions commencèrent dans la bonne humeur car l'histoire, que je vais vous conter, était parfois cocasse.

"Il y a longtemps, longtemps un village de paysans, perdu au milieu d'une forêt, recevait régulièrement les visites de malandrins, d'anciens soldats ayant déserté, menés par un certain François le Bouillant, qui sous la menace de leurs armes , leur volaient porcs, volailles, légumes de toutes sortes.
N'ayant aucun moyen de défense si ce n'est quelques fourches en bois ou fléau de battage, ils devaient subir la loi du plus fort. Un jour, un homme étrange, sans âge, vint leur demander asile pour quelques jours, promettant de rendre des services en échange de leur hospitalité.
Les braves gens acceptèrent d'autant plus volontiers qu'un étranger était toujours le bienvenu car il apportait des nouvelles d'ailleurs. Il assista un soir à l'agression dont les villageois étaient victimes. Restant bien caché, il n'intervint pas mais observa. Une fois les voleurs partis, il réunit les habitants et leur expliqua qu'il connaissait un moyen de se débarrasser de ces bandits.
En fait ce quidam était un sorcier connaissant les simples, les potions et bien d'autres choses encore. Devant eux ils fit une démonstration de son savoir. Il avala un liquide contenu dans une petite fiole en terre, se couvrit la tête d'une grande capuche et jeta un poignée de poudre dans un foyer.
Il y eu une petite explosion suivie d'une épaisse fumée blanche. Une fois la fumée dissipée Ils virent , médusés,l'homme transformé en un monstre effrayant .
Tous poussèrent un cri d'effroi, une femme s'évanouit. Quand la chose s'avança ils reculèrent terrorisés. D'une voix déformée il voulut les rassurer. " Je vais bientôt retrouver mon aspect habituel, mais vous avez vu quel effet vous pourriez produire sur vos ennemis. L'un de vous veut-il tenter l'expérience? "
" N'ayez aucune crainte " . Un jeune homme s'avança et avala le liquide. Devant ses amis éberlués il se transforma en farfadet facétieux, ce qui eut pour effet de calmer les peurs.
Le sorcier reprit la parole. " Alors, êtes vous décidés? " Des oui hésitants furent prononcés. Bientôt, devant ces quelques accords, d'autres voix se joignirent au premiers puis, enfin les plus récalcitrants se manifestèrent.
" Je pense savoir où ils se cachent, je connais bien la forêt, je propose de m'en assurer, quand je reviendrai nous irons tous ensemble les chasser et leur faire une telle peur qu'ils disparaîtront à tout jamais. "
Tout le monde acclama le sauveur et il fut fait comme il avait dit. Un soir de pleine lune, tous les volontaires pénétrèrent dans la forêt en suivant leur guide qui avait reconnu l'endroit où les bandits avaient trouvé refuge. Ils marchaient lentement en évitant de faire du bruit.
Chacun d'eux avait une petite fiole de potion qu'ils avaleraient au dernier moment. Il fallait s'assurer que ceux qu'ils traquaient étaient bien là.
Ils les trouvèrent autour d'un feu au dessus duquel un chaudron fumant était accroché à un trépied. Sans se concerter les assaillants avalèrent leur mixture et quelques minutes plus tard ils étaient prêts.
On aurait dit que toutes les monstres d'une autre planète s'étaient retrouvés là.
Ces êtres, les plus abominables que l'on puisse imaginer, encerclaient en silence le groupe de bandits, un dizaine environ, qui pour l'instant ne se doutaient de rien.
Les envahisseurs s'approchèrent en silence mais une branche craqua sous un pied, toutes les têtes autour du feu se tournèrent vers cet endroit, et ils virent ces visages hideux, ces formes inhumaines.
Bien que vieux soldats habitués aux pires spectacles, la peur les cloua au sol. Les formes innommables s'approchaient encore sans un mot.
En ces temps de croyances et de superstitions les plus aguerris prenaient peur devant l'inexplicable. Une voix sonore s'éleva leur ordonnant de fuir et de ne jamais revenir.
François le Bouillant brandit son épée mais, se retrouvant seul, choisi la fuite lui aussi. Les vilains furent tellement effrayés que jamais on ne les revit dans la région.
Cette histoire fut racontée dans les veillées de génération en génération, embellie parfois mais toujours avec la même morale :
" Mieux vaut s'unir que pâtir "
Un metteur en scène fut commandé, il écrivit le script d'après la légende contée plus haut. Tout cela coûta de l'argent bien sûr, Il fallut des costumes, des accessoires, préparer une publicité aguichante, demander aux offices du tourisme de participer.
Ce fut un investissement calculé et tout les villageois devraient s'y retrouver dans un temps raisonnable. La première année ne rapporta pas grand chose, peu de monde vint. La deuxième saison fut meilleure, la publicité et le bouche à oreille commencèrent à porter ses fruits.
Dans le même temps le jeux des acteurs improvisés s'améliora. L'espoir de voir leurs efforts récompensés leur donnèrent du talent. La troisième année fut un succès, il fallut rejouer plusieurs fois car les réservations affluèrent au syndicat d'initiative.
Déjà on envisageait d'étudier une nouvelle légende pour garder les spectateurs plus longtemps. Ceux-ci heureux d'être bien reçus achetèrent aux agriculteurs des paniers de fruits et légumes ainsi que des objets de fabrication locales avant de repartir, promettant de revenir et d'envoyer des amis. Tout alla pour le mieux. L'argent rentra.
Alors, que s'est-il passé lors de cette froide journée d'hiver?
Monsieur Gaston Laplanche s'est rendu à la préfecture, dans la ville voisine, pour accomplir quelques formalités d'ordre privé. Ayant de bonnes relations avec l'employé qui le reçoit, il expédie l'affaire pour laquelle il est venu, puis ils bavardent ensemble à bâton rompu des derniers évènements, et, entre autre, de cette animation dans son village, dont la renommé a fait le tour du département.
Dans le feu de la discussion le fonctionnaire oubliant son devoir de réserve le prévient que Gondrin risque d'avoir une grave déception, il a entendu dire que leur spectacle risquait d'être interdit pour une raison qu'il ignore.
Rentré chez lui Gaston Laplanche en parle à sa femme qui en discute avec sa voisine et ainsi dans la soirée tout le monde apprend cette nouvelle alarmante.
En effet, tous les citoyens, ayant investi dans ce spectacle devenu une source de revenus non seulement pour Gondrin mais aussi pour les commerçants ce serait un coup dur.
A coups de téléphone et de S M S, les villageois se retrouvent devant la Mairie et interpellent leur élu pour lui demander d'intervenir auprès des autorités compétentes et chercher la cause de cette menace.
On s'interroge, on suppute, on en arrive même à soupçonner son voisin, tout le monde se méfie de l'autre. Une atmosphère détestable s'installe dans la petite ville et justement le comité doit se réunir pour préparer les festivités de l'été. Il n'est pas question d'engager des frais si l'interdit tombe!
Où est la bonne humeur des premier jours! Le Maire essaye de calmer la foule et assure qu'il va faire le nécessaire. Il décide d'envoyer une délégation auprès du Préfet, et entre-temps de préparer la défense en aiguisant des arguments sérieux.
Dans les quelques jours qui ont suivi, le Préfet reçoit une petite délégation de Gondrin portant une pétition signée de nombreuses personnes demandant le maintient du spectacle annuel monté par eux.
Le préfet écoute et aimerait savoir qui est à l'origine de ce canular, car dit-il, " je n'ai aucun élément concret à ce sujet ".
Laplanche, qui ne pensait pas que l'affaire irait aussi loin, ne dévoile pas sa source. Il est notoirement connu que les politiques ont l'art et la manière de dissimuler ce qui les dérange, donc, une bonne partie de la délégation n'est pas rassurée pour autant.
Personne ne sait plus d'où vient l'information et Laplanche ne pipe mot, par contre il demande à l'employé de la préfecture d'essayer d'en savoir un peu plus et de l'informer discrètement, lui promettant de ne rien dévoiler et de jamais citer son nom.
La réponse arrive quelque jours plus tard, surprenante. Il y a bien une lettre écrite par un déséquilibré menaçant de faire exploser un engin au milieu de la foule si cette reconstitution continue d'être jouée, signée ; François le Bouillant.
Tiens-tiens, un revenant?
Arrêté par la gendarmerie il a été interné et mis en hôpital psychiatrique.
Les habitants de Gondrin ont enfin retrouvé le sourire.

   Francis Trelet le 24 février 2011

Haut de page

   Page d'accueil